L’exploitation minière artisanale est une source de revenus des populations rurales au même titre que l’agriculture et l’élevage. Au plan national, plus d’un million de personnes vivent directement ou indirectement de cette activité. C’est une contribution cruciale aux moyens d’existence des communautés dans les zones rurales en particulier.

Les effets négatifs de l’exploitation minière artisanale peuvent être nombreux, du fait de pratiques non responsables ou défaillantes, et l’une d’entre elles, d’une grande importance, concerne la santé et la sécurité dans les mines, qui est un lieu d’activité parmi les plus dangereux. L’estimation erronée des risques conduit très souvent à des accidents mortels, notamment dans la mine souterraine, où les ouvrages d’accès au gisement et les différents conduits d’aérage et de secours sont d’une importance capitale pour la survie des équipes au fond, non seulement au cours des opérations normales d’extraction mais aussi en cas d’accidents. Les éboulements de galeries ou de puits se présentent parmi les formes les plus graves d’accidents souterrains.

Les éboulements dans les statistiques de la MAPE

Les accidents mortels dus aux risques d’éboulement sont la hantise des mineurs. Ces éboulements sont plus fréquents lors de la saison des pluies entre mai et septembre, car l’infiltration des eaux tend à diminuer la cohésion des roches dégradées, et donc affaiblir leur résistance au poids.

Pour réduire les risques d’éboulement, un décret interministériel d’interdiction de l’activité d’extraction en saison hivernale a été pris en juillet 2010. Dix ans après l’entrée en vigueur de cette loi, les éboulements demeurent très nombreux sur les sites miniers, et font régulièrement la une des médias : on dénombrerait pas moins d’une centaine de disparus au dernier trimestre 2018   selon les informations du média en ligne Netafrique. En 2019, les éboulements ont été signalés à Sangoulantera dans le sud-ouest, à Kouere dans la région des Cascades, Macena, commune de Lorepeni également dans le sud-ouest . Les déclarations officielles de ce type d’accident sont cependant peu nombreuses : entre 2010 et 2016, la DEMAS[1] a enregistré plus de 300 victimes, dont plus de 200 morts liés aux éboulements ; ces chiffres ne représentent pas la réalité car beaucoup d’incidents sont camouflés ou tout simplement non identifiés (ROMBA A Gafar, août 2016). En effet, dans le cas d’exploitations informelles, les déclarations officielles peuvent amener la crainte de fermeture des sites, ou de recherche de responsabilités à l’origine de l’accident. Des raisons superstitieuses peuvent aussi être à l’origine de l’absence de volonté de déclarer officiellement ce type d’accident.

Il n’en reste pas moins que les éboulements et les accidents en général affectent profondément les mineurs artisanaux, dans leur organisation, mais aussi leur volonté de travailler en souterrain. Des périodes de deuil et des soutiens sont organisés sur certains sites miniers.

Utilisation de meilleures techniques d’extraction

La plan d’extraction et la mise au point des paramètres minimaux de distance entre les ouvrages doit se faire para adaptation des techniques d’extraction et les outils utilisés en fonction de la nature et des caractéristiques de la roche. Cela nécessite de faire un travail d’identification préalable à la réalisation des ouvrages, tel que la dureté, le taux d’érosion, l’épaisseur de sol, l’orientation et l’évolution des différents niveaux, la nature et le développement de la fracturation en fonction de la profondeur. On se rend compte qu’il s’agit d’un travail qui doit être réalisé au fur et à mesure de l’avancement des ouvrages, verticalement et latéralement.

Dans un souci de professionnalisation de la mine artisanale, les connaissances empiriques et scientifiques doivent se conjuguer pour développer un environnement favorable à l’activité.

  • Un minimum de connaissances géologiques pratiques pour les mineurs : elle peut être acquise grâce à la formation et l’information des mineurs. Elle leur permettrait de préciser de manière qualitative les caractéristiques des roches, ce qui permettrait de prendre des décisions de sécurité sur les ouvrages nécessaires pour réduire les risques d’éboulements.
  • Imposer des règles minimales de soutènement concernant par exemple la largeur minimale des parois entre 2 galeries, règles de bonnes pratiques pour le boisage des galeries et des puits, hauteur et largeur minimales des galeries et puits.
  • Mettre en place des pratiques de vérification quotidienne des ouvrages souterrains : certains mineurs effectuent cette vérification, mais elle n’est pas systématique. Elle consiste à contrôler, avant tout travail continu, la tenue des boisages ou d’autres ouvrages de soutènement, mais également à vérifier la présence de roches lâches (technique de l’égrisage), d’apparition de cassures ou failles dans les ouvrages, et d’autres signes avant-coureurs d’un possible éboulement.
  • Imposition d’une distance de sécurité entre les ouvrages d’équipes adjacentes : lorsque l’organisation des sites est mal contrôlée, on assiste à une forte concentration de puits sur des périmètres souvent très réduits. La distance minimale entre puits et galeries tend à maintenir des zones « piliers » suffisantes pour assurer la cohésion de la roche. Ceci ne doit pas empêcher la possibilité de connecter différents puits entre eux.
  • La mise en place systématique d’issues de secours et de puits d’aérage suffisants : le manque d’accès aux victimes des éboulements et l’incapacité à les évacuer est souvent le fait du manque de sorties de secours. Or, la réalisation d’un second accès aux galeries – qui est parfois réalisé grâce aux connexions entre puits voisins- est primordiale. De même l’aérage est un point crucial, car les mineurs victimes d’éboulements décèdent le plus souvent d’asphyxie.

Utilisation d’outils adaptés

Le bois, le béton sont des moyens de soutènement qui aident à la solidité des puits et galeries. Dans la pratique, ces moyens sont peu utilisés. Le bois est le plus utilisé et il s’avère en général très suffisant pour assurer une protection efficace contre les éboulements, malqré la nécessité d’un entretien fréquent en milieu humide. Le béton et le métal (communément appelés moules) offrent une plus grande assurance mais restent inaccessibles dans la pratique à cause des coûts de réalisation.

Utilisation des équipements de protection individuelle (EPI)

L’utilisation des équipements de protection individuelle par les mineurs permet d’éviter ou d’atténuer certains chocs liés aux chutes de pierres et matériaux ; il est donc essentiel de porter des casques de protection, des chaussures de sécurité, des masques, notamment.

La communication entre les creuseurs et les veilleurs

Des témoignages reçus sur les sites, les mouvements des galeries et la dégradation des parois sont des signes qui permettent d’alerter sur des possibles cas d’éboulement. Si cette alerte est faite à temps, elle peut sauver des vies. Compte tenu de la profondeur des puits, il est souvent difficile que l’information arrive à temps soit à l’intérieur du puits ou à l’extérieur. Il faut donc un système de veille à l’extérieur et également un système de communication efficace pour alerter rapidement et faciliter les premiers secours d’urgences.

Faire recours au centre de santé

En cas d’éboulement, chaque minute compte. L’alerte précoce des services compétents (pompiers, centre de santé)  est fondamentale pour maximiser les chances de garder les personnes en vie. C’est le rôle de la personne chargée de la sécurité et de la direction des premiers secours sur le chantier d’exploitation.

Des équipes et du matériel spécifique dédiés aux premiers secours

Sur chaque site, il peut s’avérer critique de fournir des premiers secours avant que les intervenants du centre de santé le plus proche n’arrivent. Il est donc important que des personnes soient formées sur le site, capables de réagie rapidement et de manière adéquate. Des équipes spécifiques doivent être là pour coordonner les travaux, fournir les bons gestes et éviter que les mineurs ne cèdent à la panique. Le repérage des victimes, l’apport d’éléments essentiels tel que de l’air pour respirer, mais aussi un contact vocal peuvent s’avérer critiques pendant les premières minutes. La coordination pour dégager les victimes doit se faire de la manière la plus efficace possible, ainsi que la prise en charge des victimes en vie une fois qu’elles sont dégagées à l’air libre ; il est donc crucial que le site d’exploitation soit équipé d’un minimum de matériel, notamment d’une trousse de premiers secours bien equipée, et d’un brancard.

[1] DEMAS : Direction des Exploitations Minières Artisanales et Semi-mécanisées (ministère des mines du Burkina)

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